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L’échec de l’application « Alerte Attentat »

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Dans un rapport du Sénat publié lundi 7 août 2017, l’application mobile « Alerte Attentat » lancée il y a un an par le gouvernement fait l’objet d’un bilan peu reluisant. Explications.

Disponible sur Android et iOS, « Alerte attentat » est jugée « imparfaite » dans un rapport d’information du sénateur Jean-Pierre Vogel (LR). Sensée avertir la population d’un événement grave en cours ou imminent et de la conduite à adopter, l’application a connu plusieurs ratés.

Ratés et « bugs résiduels »


Ainsi, lors de l’attentat de Nice du 14 juillet 2016, des dysfonctionnements ont retardé de plus de deux heures l’envoi de l’alerte. Le 17 septembre, celle-ci est lancée en raison d’une prise d’otage aux Halles à Paris. Problème : cette dernière n’existe pas.

Le rapport constate d’autres « bugs » qualifiés de « résiduels » :

  • un utilisateur a reçu une alerte alors qu’il n’était pas dans une zone de danger ;
  • d’autres ont pu recevoir un message de fin d’alerte un mois après l’attentat de Nice.


Manque de temps et concurrence des réseaux sociaux


En cause : le « délai trop contraint » de conception de l’application. Initialement prévue pour la Coupe d’Europe de football 2016, le « dispositif d’alerte par application mobile » a finalement été avancé suite à une décision du Premier Ministre en réaction aux attentats du 13 novembre 2015. Insuffisant pour la société en charge du développement, Deveryware, compte tenu de l’ampleur et de la « complexité » de la tâche.

Par ailleurs, l’application a souffert de la concurrence d’autres moyens d’alertes autrement plus efficaces et ne nécessitant pas de téléchargements supplémentaires. Ce sont les réseaux sociaux Twitter et Facebook qui bénéficient de la réactivité de leurs utilisateurs pour diffuser des alertes (même s’ils peuvent être les vecteurs de faux ou de désinformation). Ce dernier est bien pourvu avec son dispositif spécial intitulé « safety check » qui permet de signaler son état ou de prescrire les comportements adaptés à la situation.


« Alerte attentat » et la désaffection du public


Ajoutons à cela l’indisponibilité de l’application sur d’autres systèmes d’exploitation que Android et iOS, son ineffectivité pour les simples téléphones portables et un manque d’information. Résultat des courses : « Alerte Attentat » n’a été téléchargée que 900 000 fois à la mi-2017. On est loin de « la masse critique permettant d’alerter toute la population présente sur un site concerné par une alerte ». Selon le rapport, il faudrait atteindre le chiffre de 5 millions de téléchargements. Seul bon point : le respect de la vie privée d’autant plus de circonstance dans le cadre d’une application lancée par le gouvernement et donc susceptible de susciter la méfiance du public. En l’occurrence, le prestataire s’est basé sur le geofencing qui interdit toute remontée des données de géolocalisation des utilisateurs vers les serveurs.


SMS Cell Broadcast : la solution ?


Si des recommandations sont avancées pour améliorer le système, il ne fait aucun doute qu’une autre solution a les faveurs du rapport : le « SMS Cell Broadcast ». C’est pourtant ce qui avait été retenu à l’origine : il devait permettre « la diffusion, en toute circonstance, des messages d’alerte, indépendamment de la charge supportée par les réseaux des opérateurs, et offrait la possibilité de la différencier immédiatement des SMS classiques ». Il n’a pas été retenu pour des raisons de coûts et de volonté des opérateurs. L’autre option était la diffusion de SMS géolocalisés. Souffrant de nombreuses lacunes et n’ayant fait l’objet d’aucun précédent, les pouvoirs publics se sont donc tournés vers l’application mobile.

Toutefois, le rapport invite à reconsidérer le « Cell Broadcast » eu égard au bilan d’ « Alerte Attentat ». Il juge son abandon infondé alors qu’il aurait permis, en cas d’emploi, « la diffusion rapide d’un message intelligible et facilement identifiable à l’ensemble des téléphones situés dans un espace géographique donné ».

Affaire à suivre donc.

 

Article rédigé par Thierry Randretsa

 

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