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Les "digital natives" : Mythe ou réalité dans l'apprentissage des nouvelles technologies ?

Les « digital natives » n’existent pas (comme le Yéti !)
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L’affirmation est de Paul A. Kirschner et Pedro De Bruyckere, tous deux respectivement Professeur de psychologie de l’éducation de l’Université « ouverte » des Pays-Bas et Professeur en science de l’éducation de l’université d’Arteveldehogenschool en Belgique. Dans une étude citée par la prestigieuse revue Nature*, ils démontent les clichés affectant la génération née après 1984 par opposition à celle d’avant qui serait constituée des « immigrants du numérique » (« digital immigrants »).

 

Leur thèse : ceux que l’on appelle également les « millenials » ne seraient pas plus compétents que les autres dans l’utilisation instructive des nouvelles technologies. Ils s’inscrivent en faux contre le Professeur Marc Prensky à l’origine de la notion qui plaidait pour un changement des méthodes d’apprentissage conforme au nouveau paradigme.

 Explications.

 Les digital natives : humains après tout

 Le papier de Kirschner et Bruyckere analyse le phénomène sous le prisme de l’apprentissage des connaissances. Des études démontrent que la génération Y (encore une dénomination !) est plus à l’aise pour utiliser les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) pour se divertir et être indépendant que pour apprendre. Pire, ils n’ont pas forcément plus de connaissances informatiques que leurs aînés.

Si on prend l’exemple des réseaux sociaux, leur utilisation serait passive, se contentant de recevoir l’information au lieu de s’en servir comme outil de création de contenus, d’interactions et de partage de ressources**.

 

Less is more

Par ailleurs, les auteurs remettent en cause l’idée selon laquelle les « digital natives » seraient multitâches. Cela n’a rien à voir avec leurs capacités intrinsèques : l’être humain n’est tout simplement pas fait pour exercer de façon optimale plusieurs activités en même temps. Il s’agit d’une analogie erronée avec le fonctionnement des microprocesseurs informatiques. En effet, ces derniers n’effectuent pas plusieurs opérations simultanément mais à la suite. Seulement, ils sont tellement rapides qu’ils semblent en apparence tout faire en même temps***.

Il en est de même pour le cerveau humain. On peut éventuellement admettre qu’il peut gérer plusieurs tâches en parallèle lorsque celles-ci sont pleinement automatisées c’est-à-dire qu’elles ne requièrent pas de processus cognitif, comme le fait de parler et de marcher en même temps. Or, même dans ce cas, on a pu constater des failles pouvant conduire à des accidents.

Autrement dit, si les enfants du numérique sont réputés capables de faire plusieurs choses en même temps, c’est parce qu’en fait ils passent rapidement d’une activité à l’autre. Or, cela se paie par une baisse d’efficacité en raison de la période psychologique réfractaire. Celle-ci désigne la durée au cours de laquelle le second stimulus est significativement ralenti car le premier est toujours en cours. Concrètement, dans le domaine de l’éducation, cela se traduit par un déficit d’attention, des difficultés à se concentrer sur une longue période et donc un apprentissage plus laborieux.

Pour autant, il ne s’agit pas de bannir les nouvelles technologies des écoles et des universités. Les deux auteurs plaident pour une nouvelle façon de penser l’éducation afin que les NTIC soient employées de manière efficace et plaisante, tout en prenant en compte le « bagage » technique des apprenants. 

Au final, s’il peut être judicieux de catégoriser les générations en fonction de leurs objectifs de vie, de leurs croyances religieuses ou de leur consommation de drogues et d’alcool, cela est moins pertinent s’agissant des capacités d’apprentissage.

 

 

Article rédigé par Thierry Randretsa

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