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Le dilemme des véhicules autonomes : sécurité ou controverses ?

Le premier accident avec une voiture autonome
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L’accident s’est déroulé à 10 heures du soir alors que la victime du nom d’Elaine Herzberg, une femme de 49 ans, traversait une rue à pied avec son vélo. Elle est alors renversée par une voiture de marque Volvo, modèle XC90. Au volant : un chauffeur Uber du nom de Rafael Vasquez. « Au volant », c’est vite dit car le véhicule est autonome c’est-à-dire qu’il peut être conduit sans intervention humaine. C’est justement ce mode qui est activé au moment où les faits ont lieu.

Des faits encore obscurs mais non sans effets

Les circonstances du drame sont encore à éclaircir. Pour l’instant, nous savons que la victime traversait en-dehors d’un passage piéton. La voiture roulait à 61 kilomètres par heure. Si le véhicule était en mode autonome, l’opérateur à bord, a priori en pleine possession de ses facultés mentales, aurait pu reprendre le contrôle pour pallier à une défaillance technique. Or, selon les derniers éléments rapportés par les médias, il n’aurait pas eu le temps de le faire puisque les conditions (notamment nocturnes) font que la victime aurait soudainement surgit devant le véhicule. Il n’est pas fait mention également d’une quelconque « réaction » automatique de la machine. Pour autant, la police de l’Arizona avance déjà l’hypothèse que la collision était inévitable quelque soit le mode de conduite.

Même si Uber venait à ne pas être mis en cause dans cette affaire, nul doute que cet évènement aura des effets sur l’industrie des véhicules autonomes, ne serait-ce que sur son image. D’ailleurs, la réaction de l’entreprise de VTC ne s’est pas fait attendre. Après avoir adressé ses condoléances à la famille de la victime et assuré sa pleine coopération avec les autorités locales en charge de l’enquête, elle a annoncé la suspension de tous ses tests de voiture autonome sur voie publique dans le monde. Des mesures supplémentaires seront prises quand la lumière sera faite sur l’accident. Mais il n’est pas impossible que les plans de la société de faire circuler ses premiers taxis autonomes en 2019 soient remis en cause. De même, Toyota a suspendu ses tests de véhicules autonomes à Ann Harbor dans le Michigan et à GoMentum Station en Californie contrairement à Ford Motor et General Motors. De leur côté, Waymo (la division de la société Alphabet consacrée aux véhicules autonomes) et Lyft (un concurrent d’Uber) ne se sont pas prononcées.

Implacabilité des chiffres, prudence des conclusions

Il faut dire que l’argument numéro 1 des industriels du secteur est la sécurité avec des chiffres sans appel. Plus de 90 % des accidents de la route sont dus à des erreurs humaines. En France, les décès causés par ces derniers sont en constante augmentation depuis au moins 2014. Aux États-Unis, 37 462 personnes sont mortes des suites d’un accident de la circulation en 2016 selon le National Highway Traffic Safety Administration. Le chiffre est en hausse depuis 2014. En moyenne, on dénombre 1,18 morts pour 160 millions de kilomètres parcourus par l’ensemble du parc automobile.

L’équation est donc simple pour baisser ces chiffres : il suffirait de mettre « moins d’humain et plus de machine ». Ce constat ne vaudrait pas que pour le secteur automobile. Dans les domaines de la défense et de la sécurité, l’autonomie est aussi présentée comme un gage de sécurité, censé épargner la vie des soldats et minimiser les dommages collatéraux.

Le drame de lundi rappelle qu’il n’existe pas de technologie sûre à 100 %, ce que les défenseurs des voitures autonomes n’ont d’ailleurs jamais promis. Ainsi, le rapport d’experts sur la question remis l’année dernière, au Ministre fédéral des transports et des infrastructures digitales allemand, précisait bien qu’il n’était pas « possible d’empêcher complètement les accidents (…) étant donné les réalités du trafic routier hétérogène et non connecté » tout en validant les avantages du véhicule autonome « en termes de mobilité accrue, de sécurité améliorée et de gains de temps ».

Cependant, on peut se demander, en l’espèce, pourquoi les capteurs de la voiture, censés la doter d’une vitesse de réaction supérieure aux capacités humaines, n’ont pas perçu la piétonne, même apparue soudainement. C’est justement là que l’on attend l’apport du progrès technologique en suppléant aux défaillances ou aux manquements de l’humain. Faut-il pour autant penser qu’en l’absence d’autonomie, le conducteur aurait été plus attentif et aurait pu « faire quelque chose » ?

Rage against the machine

Au-delà des chiffres, c’est bien l’acceptabilité sociale de cette technologie qui est en jeu. Si cet accident fait grand bruit alors que les morts de la route dus à l’erreur humaine sont moins médiatisés, c’est aussi parce que cette technologie suscite la méfiance, si ce n’est la crainte. Depuis quelques années, les voitures autonomes sont la cible d’attaques aux États-Unis de la part de passants, au point qu’en Californie, un tiers des accidents impliquant ces véhicules sont provoqués par des humains. Alors que cet État a assoupli sa législation pour permettre les tests de voitures autonomes sur les routes sans humain au volant à partir d’avril, il n’est pas sûr que l’accident de Tempe calme les ardeurs de ces néo-luddites.

Article de Thierry Randretsa

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