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Tendances

Jeu vidéo et violence : la bataille des images

La violence des jeux vidéos
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Ce n’est pas le genre de vidéo que l’on s’attend à voir sur la chaîne officielle de la Maison Blanche. En effet, une suite ininterrompue de scènes violentes forme le contenu de la vidéo intitulée, sobrement mais justement, « Violence in video games ». Énucléation, coup de hache dans le dos, tuerie de masse, explosion de têtes et autres joyeusetés s’enchaînent sur un rythme frénétique sans texte ni commentaire pour mettre en perspective les images. Seuls les connaisseurs auront reconnu des passages chocs tirés de jeux vidéo, notamment le fameux niveau intitulé « No Russian » de Call of Duty : Modern Warfare 2 dans lequel le joueur doit massacrer des dizaines de civils à l’aide d’armes à feu.

Ironie de l’histoire : en dépit de la violence des images, la vidéo est librement accessible sur Youtube, sans restriction d’âge. Un comble lorsque l’objectif est de préserver la jeunesse d’un média censé l’influencer à commettre des crimes de masse.

La ritournelle violence = jeux vidéo

C’est au lendemain de la tuerie à l’arme à feu dans un lycée de Parkland en Floride perpétrée par Nikolas Jacob Cruz et faisant 17 morts le 14 février 2018 que le Président des États-Unis a fait part de son inquiétude à propos de l’influence des jeux vidéo violents sur la jeunesse. Début mars, il invitait des grands noms de l’industrie pour discuter du problème. En guise d’introduction, une vidéo était diffusée, celle-là même qui fait depuis le buzz sur Youtube.

Rendre les jeux vidéo responsables de la violence, et plus particulièrement des tueries de masse, est un marronnier. Déjà en 1993, un article du Figaro parlait de « l’intrusion dramatique de l’univers de jeux vidéo dans la réalité » au sujet de la prise d’otages de la maternelle de Neuilly-sur-Seine. Le suspect était présenté comme « un maniaque de « SuperMario », Mégamania (sic) et autres Zelda ».

Mais l’exemple le plus emblématique est très certainement la fusillade de Columbine au cours de laquelle un professeur et douze élèves périrent sous les balles de leurs camarades Eric Harris et Dylan Klebold dans une école secondaire en 1999. Après enquête, il s’avérait que les deux étaient fans de jeux vidéo violents comme Doom ou Duke Nukem. Il n’en fallait pas plus pour faire l’association entre les deux, une idée qui allait devenir récurrente à chaque irruption de violence au sein de la jeunesse américaine, emballement des médias aidant.

Les attaques anti-jeux vidéo viennent de tous les côtés

Si ce type d’accusation provient habituellement de personnalités ou d’organisations conservatrices, les jeux vidéo ont plus récemment fait l’objet de critiques idéologiquement progressistes ou féministes. Ainsi, un jeux vidéo comme Grand Theft Auto (GTA) a pu être accusé de sexisme, voire de jouer un rôle dans les violences faites aux femmes. C’est d’ailleurs à ce titre que le Président français Emmanuel Macron souhaite renforcer la régulation des jeux vidéo.

Le problème est que la littérature scientifique est loin d’être consensuelle sur ces questions. Si on peut admettre un certain impact (négatif comme positif) sur la psychologie du joueur, ce que certaines études contestent, leur rôle dans le passage à l’acte est loin d’être avéré.

Une vision réductrice du jeu vidéo

Loin des débats académiques, la vidéo de la Maison Blanche a réussi à faire parler d’elle. Elle recueille plus de 1 300 000 vues au moment où ces lignes sont écrites. Cela fait d’elle la cinquième vidéo la plus vue de la chaîne. Un succès inquiétant en ce qu’elle peut véhiculer une vision réductrice du jeu vidéo. C’est pour donner une autre image du média que l’association Game for Change qui croit en l’impact positif du jeu vidéo a produit un contenu en réponse à celui de la Maison Blanche. Intitulé « 88 secondes de jeux vidéo », il montre ces derniers sous leur meilleur visage avec des images colorées tirées de Zelda breath of the wild, Minecraft, Horizon Zero Dawn, Ori and the blind forest ou encore Life is Strange célébrant la créativité, la beauté, la coopération ou les sentiments.

Nul doute qu’après son visionnage, vous ne verrez plus le jeu vidéo du même œil.

Article de Thierry Randretsa

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